Les grands hommes sont trop. Un hectare planté en bananier, donnant près de 100 000 kilogrammes de fruits, suffirait à nourrir 90 hommes par an, avec une ration de 3 kiloprammes par jour, coûtant sur place 7 à 8 centimes. Compléter par une couche de gelée un peu plus épaisse ; tenir ensuite au frais jusqu’au moment de servir. Garnir le fond d’une terrine d’une couche de ces pommes ; placer dessus le faisan coloré ; l’entourer avec le reste des pommes ; arroser de quelques cuillerées de crème fraîche ; couvrir et cuire au four pendant 20 à 25 minutes. Lorsqu’il est presque cuit, retirer les légumes ; verser dans le plat un décilitre de crème ; finir de le cuire en f arrosant avec cette crème. La dresser ; la napper de sauce Suprême et l’entourer de Subrics d’épinards (voir Légumes) cuits au dernier moment. Descendu ensuite vers la rivière en passant devant la porte Barbecane, il jeta pourtant un coup d’œil sur la pittoresque maison de la Maîtrise, parce qu’en ce moment une jolie fille étendait du linge sous la galerie du troisième étage. Aussi avions-nous en réserve un petit quatorzième, qui paraissait, seulement, au moment où tout espoir de voir venir un nouveau convive était perdu.
10 le petit verre. Car avant qu’on ne les eût transportées, au xvie siècle, des bois dans les jardins, il n’était de fraises que sauvages. Plus tard, les « bois d’orangers, » un peu mécaniques dans leurs grandes caisses, qui se succédaient en fleurs tous les quinze jours dans la galerie de Versailles, ne portaient bien entendu pas de fruits. Si l’on en juge par leur valeur en douane, l’ensemble des fruits importés dont la quantité a sextuplé depuis 1870, - 216 millions de kilos au lieu de 30, - s’adressent à la consommation populaire : que le raisin d’avril, à 25 francs le kilo au temps du second Empire, ait baissé de prix, cela n’est pas de grande conséquence auprès des nouvelles cargaisons de bananes, offertes chaque année par centaines de millions aux tables les plus modestes. Le vignoble de Choisy, apprécié par Philippe-Auguste, celui de Coucy en Picardie réservé pour la bouche de François Ier, celui d’Argences aux environs de Caen, qui fournissait au xviie siècle tout le voisinage, ceux des environs de Paris, de Gonesse, de Montmorency, de Sèvres ou de Suresnes, chantés par les poètes du moyen âge et qui n’avaient point, disait un auteur sous Henri IV, « l’inconvénient d’occasionner des obstructions ou des humeurs comme ceux de Bordeaux, » tous ces crus ne sont plus qu’un souvenir.
Dans ce livre cité plus haut, - « l’An 2440, » - Mercier faisait dire par le citoyen du xxve siècle à celui du xviiie : « Nous avons sagement banni trois poisons dont vous faisiez un perpétuel usage : le tabac, le café et le thé. Paris est loin pourtant de tenir le premier rang pour l’usage de l’alcool ; la consommation par tête, dans la banlieue, dépasse des trois quarts celle de la métropole ; celle d’une dizaine de départemens de l’Ouest est double, celle de la Seine-Inférieure est triple. Mais la baguette des veneurs est vne verge plus renforcée que la dessusdicte, de la grosseur de deux ou trois poulces par la poignée, & de six ou sept pieds de long, qui leur sert pour battre les chiens en chassant quand ils faillent : laquelle baguete, ils ont vs & coustume ceremonieuse de porter verde & à tout son escorce en esté, & en hyuer escorcée & blanche. Les années que l’on regardait, en tel district de Provence ou de Languedoc, comme rares et même embarrassants par leur rendement excessif au xve ou au xviie siècle, sont inférieures de moitié ou des deux tiers aux années normales d’aujourd’hui dans ces mêmes districts.
Depuis que le thé,« impertinente nouveauté du siècle, » écrivait Gui Patin en 1648, avait été introduit en France sous les auspices du chancelier Séguier, il ne s’y était guère répandu. Cette inondation de vins eût-elle été causée par le sucrage des vendanges, que le législateur, à vingt ans d’intervalle favorisait par des remises d’impôts au temps du phylloxéra comme une « pratique recommandable, » (1884) et flétrissait ensuite du nom de « fraude délictueuse, » l’histoire, indulgente aux contradictions des hommes, ne saurait s’en émouvoir. Car, si les grands vins n’ont guère enchéri, les vins communs ont beaucoup baissé de prix : c’est de 30 à 70 francs l’hectolitre que se paya durant cinq cents ans le vin des maçons ou des soldats, celui qui était aumône aux pauvres par les hospices ou distribué gratis lors des fêtes publiques. Ce n’est pas la cherté de l’eau-de-vie, - 2 à 3 francs le litre de 1600 à 1790, - qui l’aurait empêchée de se répandre à cette époque parmi les riches ; et ce n’est pas non plus le bas prix des alcools d’industrie qui sollicite maintenant le peuple à en boire, puisque les trois-six sont rehaussés déjà par l’impôt au prix des eaux-de-vie de vin du temps jadis.